Le
monde enchanté du principe de La Rochelle
Dans le dernier
numéro des Informations Rapides de la
Copropriété (IRC) (octobre 2017),
la notaire Sylvie BOUCHET publie (p. 9) une tribune libre intitulée « Le principe de La Rochelle ».
Elle rappelle que,
selon ce « principe », « l’établissement, et a fortiori la modification d’n état descriptif de
division d’une copropriété, dès lors que celui-ci est accompagné d’un plan
dressé au vu de mesures précises, relève de la compétence exclusive du géomètre-expert ».
En effet, les
géomètres-expert ont un monopole sur les études et travaux avec plans et
documents topographiques qui fixent la limite des propriétés (article 1 de la
loi n° 46-942 du 7 mai 1946).
Selon Sylvie BOUCHET,
« le géomètre-expert traduit juridiquement la
division de l’immeuble et les règles permettant son bon fonctionnement dans
l’état descriptif de division et le règlement de copropriété, après un travail
technique de mesurage ».
Dès lors, la tribune
vise à démontrer que le notaire et le géomètre-expert doivent travailler la
main dans la main pour conseiller au mieux les copropriétaires lors de
l’établissement des règlements de copropriété et des états descriptifs de
division (EDD).
De très nombreux
citoyens ne sont pas convaincus. Pour échapper au coût du notaire et du
géomètre-expert dont ils estiment qu’ils ne les conseillent pas de manière fiable,
des tenants de l’habitat participatif en viennent à rédiger des règlements de
copropriété et des états descriptifs de division tous seuls.
Cette attitude est
compréhensible.
Géomètres-experts,
notaires et promoteurs
Les notaires et les
géomètres-experts sont évidemment les amis des promoteurs immobiliers qui
représentent une grande partie de leur clientèle. La défiance envers ces
professionnels est donc naturelle de la part de ceux dont l’action vise
justement à se passer de la promotion immobilière. Celui qui est payé par vos
ennemis est automatiquement en conflit d’intérêts quand il prétend vous conseiller.
Tous ceux qui
n’aiment pas l’idéologie individualiste de la propriété individuelle illusoire
ont donc de bonnes raisons de ne pas accepter la propagande du notariat et des
géomètres-experts.
Pour ne rien
arranger, des notaires ont également rédigé des règlements de copropriété dont
les juges notent qu’ils sont bourrés de clauses réputées. Des EDD sont estimés
par les tribunaux comme remplis de considérations illicites alors qu’ils ont
été établis par des géomètres-experts.
Dans le monde des garanties
citoyennes objectives, c'est-à-dire vérifiables, celui qui fait partie d’une profession dont la défaillance est
prouvée n’a plus à réclamer la confiance de qui que ce soit à ce titre. Les
habitants sont donc bien fondés désormais à se forger leur propre avis sans
accorder de valeur aux conseils de professionnels qui ne sont ni en position de
les éclairer du fait de conflits d’intérêts, ni en capacité de prouver leur
compétence du fait d’écarts reconnus par la justice et qui n’ont pas été
empêchés par les autorités ordinales.
Cela n’autorise pas
les citoyens à faire n’importe quoi quand ils se passent de professionnels.
Le
contenu obligatoire du règlement et de l’EDD
Le même numéro des IRC fait également paraître un entretien
avec le géomètre-expert Denis BRACHET. Le texte est intitulé « Le règlement de copropriété et l’état descriptif de division relèvent de deux régimes juridiques distincts » (p. 11 de la
revue).
Le règlement de
copropriété est, effectivement, un document contractuel dont le contenu doit
être conforme à de nombreuses dispositions de la loi du 10 juillet 1965 (voir
ses articles 8 et 43).
L’état descriptif de
division relève d’un autre régime.
En copropriété, tout
lot comprend des parties privatives et est affecté d’une quote-part de parties
communes.
On rappelle l’article
5 de la loi du 10 juillet 1965.
« Dans le silence ou la contradiction des titres, la quote-part des
parties communes afférente à chaque lot est proportionnelle à la valeur
relative de chaque partie privative par rapport à l’ensemble des valeurs desdites
parties, telles que ces valeurs résultent lors de l’établissement de la
copropriété, de la consistance, de la superficie et de la situation des lots,
sans égard à leur utilisation. »
Cela implique donc
trois critères pour répartir les quotes-parts, soit la consistance, la
superficie et la situation. Ces critères sont supplétifs (« dans le
silence ou la contradiction des titres »), ce qui signifie que le
règlement de copropriété, document contractuel, peut y déroger.
On rappelle également
l’article 10 :
« Les copropriétaires sont tenus de participer aux charges entraînées par
les services collectifs et les éléments d’équipement commun en fonction de
l’utilité que ces services et éléments présentent à l’égard de chaque lot.
Ils sont tenus de participer aux charges relatives à la conservation, à
l’entretien et à l’administration des parties communes et de verser au fonds de
travaux mentionné à l’article 14-2 la cotisation prévue au même article,
proportionnellement aux valeurs relatives des parties privatives comprises dans
leurs lots, telles que ces valeurs résultent des dispositions de l’article 5.
Le règlement de copropriété fixe la quote-part afférente à chaque lot
dans chacune des catégories de charges.
Tout règlement de copropriété publié à compter du 31 décembre 2002
indique les éléments pris en considération et la méthode de calcul permettant
de fixer les quotes-parts de parties communes et la répartition des
charges »
Cet article est
d’ordre public, ce qui signifie que toute stipulation du règlement de
copropriété qui y dérogerait serait réputée non écrite.
Ainsi, et comme le
note Denis BRACHET, un règlement de copropriété peut prévoir librement la
répartition des quotes-parts concernant les votes. Par contre, en ce qui
concerne les charges, il faut respecter impérativement les critères de la consistance,
de la situation et de la superficie.
Parce que de trop
nombreuses erreurs ont été commises, le législateur a exigé qu’à partir de 2002,
les états descriptifs de division incorporés dans les règlements de copropriété
indiquent la méthode de calcul et les éléments pris en considération. Cela vaut
donc aussi pour des géomètres experts, ce qui montre que la confiance règne par
rapport à la qualité des prestations passées…
Et
maintenant, au travail !
Rien dans la loi n’empêche
les habitants de préparer eux-mêmes le règlement de copropriété et l’état
descriptif de division mais pas en travaillant n’importe comment.
Le règlement de
copropriété doit incorporer tous les textes d’ordre public. Legifrance n’étant pas fait pour les
chats, il n’y a rien de plus facile que de faire un copier-coller tout en
citant clairement les textes. Ainsi, le notaire qui publie l’acte peut vérifier
qu’au moins on ne lui demande pas de procéder au dépôt d’âneries au rang de ses
minutes.
Pour l’EDD, les
citoyens habitants rédacteurs doivent faire référence aux critères et aux
méthodes de mesure en citant explicitement des ouvrages techniques destinés aux
géomètres-experts.
S’ils ont l’intelligence
de faire cela, les citoyens comprendront alors la valeur du regard critique de
relire leurs écrits en rappelant bien que le notable, qu’il soit notaire ou
géomètre-expert, n’est pas légitime pour employer l’argument d’autorité, au vu
des conflits d’intérêts dont chacun doit rester conscient. Il ne peut s’exprimer
qu’en étayant son propos soit sur une disposition législative d’ordre public,
soit sur un élément technique validé par la bibliographie professionnelle
reconnue.
Charlatans
idéalistes et refus du sérieux
Seuls les citoyens
qui ont travaillé pour contrôler les professionnels du droit ou du mesurage
peuvent ensuite se plaindre s’ils sont victimes d’une omerta malveillante.
Encore faudrait-il que
cette omerta existe.
Des notaires
acceptent le dépôt d’actes rédigés par des coopérateurs, du moment que les
documents sont sérieux, bien entendu. Ceux qui veulent des adressent peuvent
demander au LGOC.
Cela signifie que des
notaires préférant sans doute travailler avec des promoteurs acceptent d’aider
des habitants qui agissent par eux-mêmes. On ne peut pas demander à ces
notaires la lune, et notamment pas d’aller à l’encontre des idées qui restent
les leurs. Par contre, ils n’empêchent pas les citoyens d’agir et il faut les
en remercier.
Dès lors, les
populistes du participatif seraient bien avisés de réfléchir avant de vitupérer
contre les juristes et les professionnels de l’immobilier. S’il s’agit d’injurier
les notaires qui refusent d’enregistrer des torchons, ce n’est pas acceptable.
Quand les habitants
ne veulent rien faire et s’en remettent aveuglément au notaire et au
géomètre-expert, qu’ils ne viennent pas pleurnicher ensuite. Les pratiques des
professionnels sont évidemment classiques et correspondent à ce que souhaitent
les promoteurs immobiliers. C’est normal et il en résulte la banalisation des
immeubles en copropriété issus de l’habitat participatif. Ce n’est pas de la
faute des notaires et encore moins des juristes qui sérieusement étudient en
public les critères juridiques de la participation.
Tant qu’il
y aura des trolls libéraux libertaires
Les crapules, dans la
situation présente, ne sont ni les notaires, ni les géomètres-experts mais bien
les charlatans libéraux libertaires. Sous prétexte d’idéalisme qui cache en
fait une volonté de se forger des rentes indues, ils sont incapables de mettre
les mains dans le cambouis et de respecter le travail des autres pour contrôler
réellement les professionnels. Ce faisant, ces individus se rendent complices
du statu quo, comme les gauchistes qui se sont changés en meilleurs défenseurs
du capitalisme sauvage.
Les propagandistes de
la participation qui appellent les habitants à la nullité juridique transforment
donc les citoyens en proies désarmées face aux mauvaises habitudes ambiantes.
Les professionnels du
droit et du mesurage n’en sont pas responsables. Ils ne font qu’être guidés par
leurs intérêts bien compris, ce qui est tout à fait humain.
Si les citoyens
étaient plus avisés, instruits et exigeants, le travail des notaires et des
géomètres-experts ne pourrait d’ailleurs que s’en trouver amélioré.
Les marchands de
rêveries qui empêchent les citoyens d’être acteurs de leur propre destin sont
donc les principaux responsables des malheurs présents.
Comme ces individus
malveillants sont prompts aux attaques et au harcèlement de ceux qui ont fait
leur preuve, ce sont des trolls.
Tant qu’il y aura des
trolls empêchant l’action collective et discréditant ceux qui proposent des
performances vérifiables sur la base d’éléments étayés, on ne peut espérer que
le travail soit bien fait.
CQFD
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire