lundi 24 octobre 2016

Habitat différent : des pionniers de la copropriété participative



Lors des rencontres Habitat Participatif Ouest du 21 octobre 2016 (http://bit.ly/2dsHdvv), des représentants d’Habitat différent ont présenté leur démarche.




(Photo extraite de la plaquette distribuée par Habitat Participatif Ouest pour la journée du 21 octobre 2016)


Ce groupe emblématique situé à Angers regroupe 17 foyers depuis 1987 réunis en copropriété, en partenariat avec un bailleur social, le Toit angevin, devenu depuis PODELIHA.

A l’origine, des tenants de l’auto-construction et des partisans de l’habitat groupé se sont réunis en association et ont signé une convention avec un bailleur social pour construire des maisons où le but était de « vivre ensemble chacun chez soi ».

La maîtrise d’ouvrage fut effectuée par le Toit angevin (devenu depuis PODELIHA) et par « Anjou Castors ».

L’association devait gérer les parties communes nombreuses (locaux pour les vélos, salle de réunions, espaces verts, un atelier, un studio pour recevoir des personnes extérieures, un local pour les jeunes habitants scolarisés au collège et même un four à pain…). Un processus a été mis en place pour permettre à l’association de donner son assentiment à l’arrivée de nouveaux habitants.

Habitat différent a mis en ligne le règlement de copropriété (https://hd49.wordpress.com/documents-hd49/) où l’article 32 (premier alinéa) indique : « Chaque habitant, qu’il soit propriétaire ou locataire, doit obligatoirement adhérer à l’Association ‘‘Habitat Différent’’ ».

Bien évidemment, en trente ans, des habitants sont partis, d’autres sont arrivés.

Les relations avec le bailleur social ont changé, celui-ci souhaitant visiblement vendre ses lots (https://hd49.wordpress.com/).

La plaquette distribuée aux 150 participants de la remarquable rencontre du 21 octobre 2016 évoque, pour le projet Habitat différent, « l’inéluctable accession généralisée à la Copropriété (entre autre imposée par le Bailleur qui supprime le passage obligé par le locatif social) ». Cette évolution impliquant une prise de distance du bailleur social et un poids toujours plus grand des règles classiques de la copropriété avait été évoquée par l’ouvrage Changer la vie, déjà décrit sur ce blog (http://bit.ly/1F1lFiL).

Néanmoins, les participants au projet ont réussi à maintenir une dynamique collective forte, en mettant ponctuellement, mais régulièrement, à disposition de personnes sans domicile le studio mutualisé servant de chambre d’ami, et cela en partenariat avec des associations d’aide à l’hébergement.

On ne peut qu’être très admiratif pour cette attitude, ainsi que pour l’humour que manifestent les participants (https://hd49.wordpress.com/juste-pour-rire/) dans un lexique des termes de l’habitat groupé.

On peut ainsi relater le commentaire amusant sur la notion d’habitat participatif :

« ‘‘l’habitat participatif ? C’est pas rentable, ça marchera jamais, c’est un truc de bobos ça encore !’’ déclaration d’un directeur de coopérative HLM, début du XXIe siècle. »

Autre définition remarquable : celle du mot « copropriétaire » :

« COPROPRIÉTAIRE : nom masculin parfois féminin aussi [kou-yon]

Déf : Locataire qui, dans l’illusion d’une réussite sociale relative, condamne sa famille à maints tourments et tracasseries en acquérant le vide à l’intérieur des murs qui l’entourent.
Syn : propriétaire, bourgeois(e), riche, voleur(euse)…
Ex : Si la propriété c’est un vol, la copropriété c’est un vol réflexif (sagesse populaire) »

Enfin, la plus drôle des définitions :

« EXPERT(E) (de l’habitat participatif) : nom commun [chi-heur/chi-heuz]
Déf : Nom donné à des gens qui sous prétexte de se faire du pognon sur le dos de l’habitat participatif viennent t’expliquer avec des mots que tu ne comprends pas (pour être sûrs de ne pas être contredits) comment tu dois vivre. N’ont en général jamais passé plus d’une petite semaine dans un habitat participatif, mais en ont beaucoup parlé ici ou là… Ont parfois fait des études, mais de quoi ? Le mystère reste entier ! Ils sont à l’habitat participatif ce que les poux et le coiffeur sont aux cheveux : des parasites.
Syn : accompagnateur, initiateur de projets, parasite, beau-parleur, emmerdeur, malfaisant…
Ex : ‘‘Règle n°12 : Enfermez les experts dans une salle avec un vidéo-projecteur et un powerpoint, fermez bien la salle à clé, et allez boire un coup, vous gagnerez du temps.’’ in, Bréviaire du projet d’Habitat Participatif, Éditions sociales, Paris, Janvier 2013 »
Voilà qui est bien envoyé !

Les acteurs du groupe Habitat différent ont donc expérimenté depuis 30 ans ce que pourrait être une copropriété plus participative, même si, au plan juridique, il y a encore beaucoup à faire pour rendre plus solide les expérimentations tentées.

Les mutations du droit de la copropriété avec services depuis la loi du 28 décembre 2015 (n° 2015-1776) implique un véritable défi pour pérenniser de manière conforme à la loi et à la Constitution l’action collective dans des ensembles immobiliers de ce type.

L’adhésion à une association de la loi de 1901 rendue obligatoire par un règlement de copropriété paraît, avouons-le, contestable au plan du principe de la liberté d’association, qui a valeur constitutionnelle (Conseil constitutionnel, décision n° 71-44 DC du 16 juillet 1971).

Par contre, il est possible d’imaginer qu’un décret permette la prise en charge de l’animation d’une démarche citoyenne (article L 200-1 du Code de la Construction et de l’Habitation) dans le cadre d’un service spécifique non susceptible d’être individualisé. Cela serait conforme à l’article 41-1 de la loi du 10 juillet 1965.

Ce service pourrait alors être confié à une association dont la rétribution constituerait des charges de copropriété en application de l’article 10 de la loi du 10 juillet 1965 qui dispose, dans ses deux premiers alinéas : « Les copropriétaires sont tenus de participer aux charges entraînées par les services collectifs et les éléments d'équipement commun en fonction de l'utilité que ces services et éléments présentent à l'égard de chaque lot.
Ils sont tenus de participer aux charges relatives à la conservation, à l'entretien et à l'administration des parties communes proportionnellement aux valeurs relatives des parties privatives comprises dans leurs lots, telles que ces valeurs résultent des dispositions de l'article 5. ».

Ainsi, on pourrait pérenniser les magnifiques initiatives comme celle d’Habitat différent tout en respectant les principes constitutionnels applicables.

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