samedi 15 septembre 2018

La participation sans la démocratie ?


Le LGOC et l’IGCHF, qui tiennent le présent blog, ont suscité la parution d’un ouvrage démontrant que participation et démocratie peuvent aller de pair, sans cacher que ce n’est pas toujours le cas actuellement. Il est vrai que ceux qui promeuvent la participation peuvent aussi être guidés par le culte de l’argent, par le souci de dominer des masses inféodées ou par la volonté de constituer une élite fermée. Seuls ceux qui construisent des collectifs égalitaires ouverts à tous mais avec un compagnonnage obligatoire pour éviter le chaos individualiste sont d’authentiques démocrates.



La fin d’un discours simpliste sur la participation démocratique



Un certain discours relatif à la ‘‘démocratie participative’’ consiste à appeler les citoyens à se mobiliser dans l’action collective pour retrouver une capacité d’influence sur leur propre vie.

La tendance conduite par Benoît HAMON ainsi qu’Europe Ecologie Les Verts a souvent adopté cette phraséologie.

Si ce courant politique a connu quelques difficultés en 2017 et qu’il semble assez mal en point, c’est parce que ce raccourci est simpliste. Il est vrai qu’on ne peut pas être démocrate seul dans son coin mais en s’associant avec des individus assujettis par des tyrans, on n’œuvre pas à la démocratie non plus.

Une action collective peut ne pas être démocratique du tout, même s’il est vrai qu’il ne peut pas y avoir de démocratie sans action collective.

L’ouvrage qui vient de paraître aux éditions du Puits fleuri le montre :








Les différents types de participation

Dans ce livre, quatre types de participation sont repérés.

Le premier mode de participation est démocratique. Il repose sur l’intégration de tous sans discrimination. Toutefois, il nécessite aussi une organisation qui oblige chacun à respecter les autres dans une égalité stricte.

Pour éviter la sauvagerie consumériste et l’esprit d’avidité hérité de mai 1968, chaque nouveau membre d’un tel collectif doit s’astreindre à un compagnonnage auprès d’une personne qui a déjà prouvé qu’elle était capable de s’associer aux autres à égalité.

Ensuite, après ce compagnonnage, les nouveaux venus doivent prendre toute leur place à égalité avec les autres dans la gestion du groupe.

Le second mode de participation est aristocratique. Il repose sur l’idée que certaines personnes, du fait de leur culture, de leur genre, de leur degré d’instruction, de leurs choix de vie, de leur religion ou de leur couleur de peau, doivent être exclues car elles sont inférieures.

Le groupe pratique alors la cooptation pour interdire la venue de tous ceux qui déplaisent aux membres. C’est contraire au principe de mixité dont certains élus prétendument progressistes nous rebattent les oreilles, mais après tout, chacun est libre de faire ce qu’il veut du moment qu’il ne demande pas le soutien de la puissance publique, qui n’a pas à soutenir la constitution de privilèges et le repli communautariste.

Le troisième mode de participation est ploutocratique, de ploutos, la ‘‘richesse’’ en grec ancien. Là encore, le groupe est fermé mais la sélection des membres ne repose que sur l’argent.

Enfin, la participation peut se fonder sur l’intégration de masses remuantes qui s’expriment dans le désordre mais qui sont placées sous la dépendance de dirigeants qui les manipulent. C’est là un fonctionnement ochlocratique, du grec ancien ochlos (qui se prononce okhlos), la ‘‘foule mue par ses instincts’’.

Entre démocratie, aristocratie, ploutocratie et ochlocratie, le livre précité n’opère pas une hiérarchisation morale. Il repère simplement les modes d’organisation les mieux adaptés à chaque attitude.

Un outil pour les citoyens, les élus et les professionnels

Grâce à cet ouvrage, les citoyens peuvent vérifier la correspondance entre ce qu’on leur promet et ce qu’on leur vend effectivement.

Trop souvent, des promoteurs parlent d’habitat participatif parce qu’il s’agit d’un verbiage sympathique en évoquant la démocratie avec grandiloquence.

Dans les faits, ils vendent un fonctionnement relevant au mieux de l’aristocratie ou de la ploutocratie, au pire de l’ochlocratie.

Avant de s’investir dans de tels projets, la population doit y voir plus clair.

Des animateurs professionnels payés grâce à des subventions publiques n’ont également que le mot démocratie à la bouche alors qu’ils encouragent la cooptation aristocratique.

En France, on a évidemment le droit de fonder des associations aristocratiques ou ploutocratiques voire despotiques. À l’inverse, il ne saurait alors être question de disposer alors de soutiens financiers de la collectivité.

Les groupes fonctionnant sur une base élitiste n’ont pas à être soutenus par la puissance publique pour leur fonctionnement. Les élus doivent être plus vigilants à cet égard pour ne pas soutenir « l’entre-soi à coups de deniers publics » selon la formule d’une fonctionnaire d’une collectivité bretonne.

Quant aux professionnels du droit et de l’immobilier, ils voient surgir la concurrence plus ou moins loyale d’acteurs non formés souhaitant conseiller les groupes d’habitants sans payer de charges équivalentes à celles des intervenants traditionnels.

Notaires, avocats et syndics doivent réagir au lieu de se laisser manipuler par ceux qui dévalorisent leurs professions. Les attitudes ultralibérales et libertaires consistant à favoriser l’irruption d’individus à n’importe quelle condition sur un marché ne relèvent pas de la démocratie mais de l’ochlocratie.

Les consommateurs doivent en être avertis. S’ils veulent se comporter comme des pigeons, libre à eux, mais qu’ils ne s’étonnent pas d’être plumés à la fin.